Longtemps cantonnée aux démonstrations de force terrestres ou maritimes, la Chine investit désormais massivement les airs avec des technologies de rupture. Sa dernière prouesse en date : le Jiutian SS-UAV, un imposant drone sans pilote qui pourrait bien redéfinir la manière dont se mène la guerre à distance. Présenté comme une plateforme aérienne autonome capable de lancer des essaims de drones, le « vaisseau-mère » fascine autant qu’il inquiète.
- La Chine présente le Jiutian SS-UAV, un drone géant capable de voler 9 jours et de lancer des essaims de drones kamikazes.
- Ce drone peut transporter 6 tonnes d’équipement et couvrir 7 000 km à haute altitude, symbolisant une nouvelle stratégie aérienne.
- Ses faiblesses potentielles concernent sa vulnérabilité aux défenses modernes et ses dépendances en communication dans un contexte de guerre électronique.
- Le développement du Jiutian envoie un message stratégique à Taïwan, aux États-Unis et aux autres puissances régionales.
Le Jiutian SS-UAV est un drone géant capable de voler 9 jours en continu
Avec ses 25 mètres d’envergure et un poids maximal au décollage de 16 tonnes, le Jiutian ne joue clairement pas dans la même catégorie que les drones de surveillance traditionnels. Il ne s’agit pas d’un simple appareil furtif : c’est un système de projection conçu pour naviguer à 15 000 mètres d’altitude durant neuf jours consécutifs, en couvrant jusqu’à 7 000 kilomètres. Un exploit énergétique et logistique, qui lui permet d’opérer loin du territoire chinois, dans une logique de projection stratégique.
Sur ses huit points d’emport externes, l’appareil peut charger jusqu’à 6 tonnes de matériel : bombes lourdes, missiles air-air, mais surtout une impressionnante quantité de drones kamikazes ou de surveillance. Selon les médias d’État, le Jiutian pourrait embarquer plus d’une centaine de micro-drones, capables d’intervenir en essaim, autonomes mais coordonnés par une IA embarquée.
Le drone, nouvelle tête de pont tactique ?
Le concept n’est pas nouveau : les États-Unis expérimentent eux aussi des architectures similaires avec des projets comme Gremlins ou Skyborg. Mais la Chine semble vouloir pousser cette idée à l’extrême, en transformant un drone en une véritable base aérienne volante. Le Jiutian pourrait ainsi surveiller des zones entières, désactiver les communications ennemies via la guerre électronique, ou même lancer des attaques coordonnées contre des cibles terrestres.
Cette approche change la donne. Plutôt que de miser sur un unique appareil furtif à haute valeur stratégique, Pékin parie sur le nombre, la redondance, et la saturation du champ de bataille par des nuées de drones à bas coût. En cas de perte d’un essaim, un nouveau peut être relancé dans l’heure. Une logique qui rappelle davantage les cyberattaques distribuées que les conflits conventionnels.
Un prototype aux capacités discutées
Malgré ses performances annoncées, tout le monde ne partage pas l’enthousiasme des commentateurs chinois. Le New York Post qualifie le Jiutian de « gros, lent et peu furtif », le rendant hautement vulnérable aux défenses aériennes modernes. À 700 km/h, ce géant des airs est bien loin de la vitesse d’un F-35 ou d’un drone de combat furtif de type XQ-58A. Une fois repéré, il pourrait devenir une cible facile, à moins que son escorte de drones ne parvienne à détourner l’attention des défenses adverses.
De plus, son fonctionnement repose sur une infrastructure de communication robuste entre le drone-mère et ses essaims. Or, dans un contexte de guerre électronique, ces liaisons sont les premières à être brouillées ou interceptées. La sophistication de l’IA embarquée, capable de prendre le relais en cas de perte de signal, reste encore une zone d’ombre.
Un message à peine voilé à Taïwan et au monde
Le timing de cette démonstration technologique n’est pas anodin. À quelques semaines de son premier vol d’essai prévu en juin 2025, le Jiutian apparaît comme un signal clair envoyé à Taïwan, mais aussi aux États-Unis, au Japon ou à l’Inde : la Chine se dote d’une capacité de frappe asymétrique capable de contourner les lignes de front traditionnelles.
Si les tests s’avèrent concluants, Pékin pourrait disposer dès 2026 d’un nouveau levier de pression, dans un contexte géopolitique tendu. Une force d’interdiction aérienne douce, non pas par l’occupation du ciel, mais par la menace permanente d’une saturation électronique ou physique.
Difficile à ce stade de séparer le fantasme militaire de la réalité technique. Le Jiutian SS-UAV intrigue par sa promesse d’un champ de bataille automatisé, où un unique appareil pourrait coordonner des centaines d’autres. Mais ses failles en matière de furtivité, de vitesse et de dépendance aux communications posent de sérieuses limites.
La vraie question est donc la suivante : la Chine cherche-t-elle à produire un outil opérationnel fiable, ou simplement à marquer les esprits, comme elle l’a déjà fait avec son porte-avions Fujian ou son avion furtif J-20 ? Réponse peut-être dans les mois à venir, lors des premiers essais en vol de cet étonnant drone-mère.
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