C’est à Grenoble qu’un incroyable exosquelette commandé par la pensée vient tout juste de voir le jour. Résultat de 10 années de recherches, ce prototype fonctionne grâce à des électrodes implantées dans le crâne du patient.
Une armure motorisée connectée au cerveau
C’est une grande première médicale et c’est en France que ça se passe. Les équipes du centre de recherche biomédicale Clinatec à Grenoble ont permis à Thibault, paralysé des quatre membres depuis une chute il y a quatre ans, de retrouver une grande partie de sa mobilité.
L’ exosquelette fonctionne grâce à des électrodes qui ont été implantées dans le crâne de Thibault il y a deux ans. Ceux-ci sont capables de « capter les signaux envoyés par le cerveau et les traduire en signaux moteurs » explique Alim-Louis Benadid, professeur à l’université Grenoble-Alpes renommé pour ses travaux sur la stimulation cérébrale, en charge de l’étude.
Pour réussir à se mouvoir à l’aide de l’imposant dispositif, Thibault a d’abord dû s’entraîner sur simulateur chez lui pendant plusieurs mois. Durant cette phase, son implant cérébral lui a permis de faire bouger un avatar virtuel sur l’écran de sa télévision :
J’ai dû réapprendre petit à petit. La plasticité cérébrale fait qu’on retrouve les ordres à envoyer pour obtenir les bons mouvements, de manière beaucoup plus souple, beaucoup plus naturelle.
Une fois l’entraînement terminé, Thibault a pu revêtir l’exosquelette afin de reproduire les exercices qu’il avait réalisés chez lui. Il peut désormais avancer les jambes de la machine, plier le coude et lever les épaules.
L’intelligence artificielle au premier plan
Si les chercheurs ont démontré qu’il était possible de capter l’activité électrique du cerveau et de la transmettre en temps réel à la machine (et sans fils ! ) le chemin n’en demeure pas moins encore très long avant que l’exosquelette domestique ne devienne une réalité. Alim-Louis Benabid explique tout la complexité d’un tel dispositif :
Cela nécessite des calculs très lourds et des temps de réaction très rapides, sur lesquels on est en train de travailler, en utilisant l’intelligence artificielle
Le mois prochain, l’exosquelette de Clinatec devra passer au niveau supérieur avec un nouvel essai clinique sur un autre patient lui aussi équipé des fameuses électrodes. Cette prochaine étape devrait permettre au patient de saisir un objet avec la main et d’améliorer l’équilibre du prototype, son principal point faible.
Interface neuronale directe, un domaine en plein développement
L’implantation d’électrodes pour stimuler les muscles par le cerveau est un procédé déjà utilisé par d’autres équipes de chercheurs et qui augure de grandes avancées dans un futur proche. Mais là où l’étude du professeur Benadid se démarque de tout ce qui a été fait précédent dans le domaine, c’est qu’elle est la première à exploiter directement les signaux électriques du cerveau pour contrôler un exosquelette.
Le professeur Benadid insiste néanmoins sur un point :
Ce n’est pas du transhumanisme : on répond à un problème médical, un corps humain qui a été blessé et qui a des déficits. On est dans l’“homme réparé” et pas l’“homme augmenté”
Un grand bravo également à Thibault qui malgré le handicap et la fatigue de son entraînement se dit heureux de « pouvoir faire avancer la science ».ia