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ChatGPT rend-il plus bête ? La science a tranché

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Une nouvelle étude du MIT secoue les certitudes sur l’usage de l’intelligence artificielle dans les tâches intellectuelles. Si ChatGPT permet d’écrire plus vite, mieux ou avec moins d’effort, son utilisation intensive pourrait aussi entraîner des effets délétères sur nos capacités cognitives.

C’est du moins ce que suggère une recherche récente, menée avec EEG à l’appui, sur les performances cérébrales d’utilisateurs d’outils d’IA générative.

Une expérience inédite pour mesurer « la dette cognitive »

L’étude, intitulée “Your Brain on ChatGPT: Accumulation of Cognitive Debt when Using an AI Assistant for Essay Writing Task”, a été publiée en juin 2025 sur arXiv.org, une plateforme ouverte de prépublications scientifiques. Les chercheurs du MIT et de l’Université de Pennsylvanie ont recruté 54 participants âgés de 18 à 39 ans pour une expérience autour de la rédaction d’essais de type SAT.

Trois groupes ont été constitués :

  • le premier devait rédiger ses essais avec l’aide de ChatGPT
  • le deuxième avec Google Search,
  • et le troisième sans aucune assistance numérique.

Pendant la rédaction, les chercheurs ont analysé l’activité cérébrale via électroencéphalogramme (EEG) pour mesurer ce qu’ils appellent la « connectivité alpha-band », un indicateur des efforts mentaux et du traitement cognitif.

Moins de connexions cérébrales chez les utilisateurs d’IA

Les résultats sont sans appel. Les utilisateurs de ChatGPT ont montré une activité cérébrale significativement plus faible que les autres.

En moyenne, leur connectivité alpha n’était que de 42 connexions, contre 79 pour le groupe « cerveau seul ».

« Cette réduction suggère un niveau d’engagement cognitif nettement inférieur chez les personnes utilisant une IA générative », écrivent les auteurs de l’étude.

Pire encore, 83 % des participants ayant rédigé avec ChatGPT étaient incapables de se souvenir d’au moins une citation précise de leur propre texte quelques minutes après l’avoir écrit. Le phénomène a été qualifié de « dette cognitive » : une perte de maîtrise et de compréhension au profit d’un produit final propre, mais déconnecté de l’auteur humain.

L’utilisation de l’IA rend-il plus bête selon vous ?

Faut-il cesser d’utiliser ChatGPT pour écrire ?

Les chercheurs ne condamnent pas l’outil, mais alertent sur ses effets s’il est utilisé de manière passive ou automatique. « L’utilisation d’IA comme ChatGPT peut être très bénéfique pour améliorer la qualité rédactionnelle ou surmonter un blocage créatif. Mais elle doit s’accompagner d’un engagement actif de l’utilisateur pour ne pas aboutir à un appauvrissement cognitif », précisent-ils.

L’étude recommande de combiner l’usage de l’IA avec des méthodes actives d’apprentissage ou de reformulation pour conserver une trace mentale du contenu produit. Par exemple, prendre le temps de relire à voix haute, de reformuler avec ses propres mots ou de mémoriser les points clés du texte aide à maintenir les fonctions cognitives sollicitées dans la production d’idées.

Une alerte dans un contexte d’IA omniprésente

Ces résultats s’inscrivent dans un débat plus large sur les effets cognitifs des technologies. Plusieurs experts alertent depuis des années sur le fait que l’automatisation croissante de tâches intellectuelles (calcul, mémoire, recherche d’information) affaiblit à terme notre autonomie mentale.

Le philosophe américain Nicholas Carr, dans son essai The Shallows, évoquait déjà en 2010 le risque d’un cerveau « distrait, rapide, mais superficiel » à force de tout déléguer au numérique.

Avec les IA génératives, cette bascule s’accélère. Des outils comme ChatGPT, Gemini ou Claude permettent désormais de produire du contenu complexe en quelques secondes, de résumer des textes entiers, voire de coder ou raisonner à la place de l’utilisateur. Un confort certain, mais qui pousse certains chercheurs à appeler à un usage réfléchi, voire régulé…

Ingénieur ENSAM Paristech et diplômé du MBA de l'ESSEC, Fabien est journaliste Tech & Pop Culture mais aussi Consultant IA et Marketing.