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 Le directeur artistique des JO prend la tête de la Commission d'aide au jeu vidéo

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Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) a annoncé la nomination de Thomas Jolly à la présidence de la commission d’aide au jeu vidéo. Une désignation qui ne laisse personne indifférent, tant elle alimente un débat sur la légitimité et la gouvernance de l’institution.

Le metteur en scène des JO Paris 2024 devient président de la commission d’aide aux Jeux Vidéo

Metteur en scène et directeur artistique de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, Thomas Jolly avait déjà exprimé à plusieurs reprises son intérêt pour le secteur vidéoludique, notamment dans une interview accordée à Ubisoft il y a quelques mois.

Il y affirmait jouer depuis l’enfance, et voir dans le jeu vidéo un prolongement naturel de sa passion pour le spectacle vivant :

« Depuis l’enfance je joue. Pas seulement au théâtre, mais aussi aux jeux vidéo. Au ludisme s’est adjoint, au fil des ans, l’émerveillement permanent pour un art qui ne cesse de repousser les limites de la création, avec au cœur de ce processus créatif la place du joueur ou de la joueuse. C’est l’un des nombreux ponts que j’établis entre le jeu vidéo et ma pratique du théâtre : le même soin et la même exigence pour celles et ceux à qui nos arts s’adressent ».

Il succède ainsi à l’écrivain Maxime Chattam, qui avait dirigé cette commission pendant quatre ans, et hérite d’un mandat de deux ans pour piloter un dispositif central.

Le fonds d’aide au jeu vidéo du CNC dispose en effet d’un budget de 5 millions d’euros annuels pour soutenir les créateurs à chaque étape : écriture, préproduction et production.

Ces aides sélectives, cumulées au Crédit d’impôt jeu vidéo, ont permis à des projets ambitieux d’émerger sur le marché, comme Chants of Sennaar (Rundisc) ou le récent phénomène Clair Obscur: Expedition 33 (Sandfall Interactive).

  • Clair Obscur: Expedition 33 (PS5)
    Reactive Turn-based Combat – In this evolution of JRPGs, real-time actions enhance the heart of turn-based combat. Build your party and level up six characters. Craft unique builds for your expeditioners that fit your playstyle via gear, stats, skills, and character synergies. Open an active dimension in combat – dodge, parry, and counter in real time, chain combos by mastering attack rhythms, and target enemy weak points using a free-aim system. “Tomorrow Comes” – With only one year left to live, join Gustave, Maelle, and their fellow Expeditioners as they embark upon a desperate quest to break the Paintress’ cycle of death. Follow the trail of previous expeditions and discover their fate. Get to know the members of Expedition 33 as they learn to work together against impossible odds. A Hauntingly Beautiful World – Explore an enchanting realm populated by surreal adversaries. Wander through breathtaking landscapes, from the Island of Visages to the Forgotten Battlefield, discovering secrets and hidden quests along the way. Find allies of fortune in creatures of legend and recruit a special companion who can access new travel methods and secret areas in the World Map. Experience the debut game from Sandfall Interactive, fully realized in Unreal Engine 5 with stunning graphics and a heartbreaking soundtrack.
  • Clair Obscur: Expedition 33 [PS5]
    Führe die Expedition, zerschlage den Zyklus

Une nomination plus symbolique que technique ?

Depuis l’annonce, les réactions négatives pleuvent sur les réseaux sociaux. Une partie des professionnels s’interroge sur la pertinence d’un profil artistique, mais non spécialiste du jeu vidéo, pour piloter un dispositif aussi structurant.

Thomas Jolly n’a jamais travaillé dans la production vidéoludique, même s’il revendique un regard de joueur passionné et une sensibilité créative proche des univers interactifs. Cela suffit-il pour convaincre ?

Derrière ce choix, certains pointent une forme de continuité avec Maxime Chattam : un regard artistique, certes, mais détaché des réalités concrètes du développement de jeux vidéo. Ce mode de gouvernance suscite des critiques, notamment sur la question d’une cooptation culturelle au détriment de la compétence technique…

Gaëtan Bruel, la variable politique

Autre sujet qui cristallise les critiques : le rôle joué par Gaëtan Bruel, tout récent président du CNC, nommé en février dernier. Ancien de l’ENS, ex-conseiller culture à l’Élysée, il a pris la tête du CNC via un dispositif discrétionnaire, hors concours, comme 580 autres postes stratégiques relevant d’une nomination politique. Sa trajectoire, sans formation spécifique cinéma ni audiovisuel, alimente la méfiance, et certains voient la nomination de Thomas Jolly comme un prolongement de cette approche.

Thomas Jolly ne sera pas seul : la vice-présidence de la commission revient à Julie Chalmette, actuelle directrice générale adjointe de Don’t Nod Entertainment. Elle sera épaulée par dix membres titulaires issus du secteur (Ubisoft, Quantic Dream, Focus Entertainment, Passtech Games…) et six suppléants. Cette composition, qui mêle créateurs, producteurs, compositeurs et même streameuses, devrait garantir un socle d’expertise solide pour l’évaluation des projets.

En pratique, la commission reste un levier essentiel pour le jeu vidéo français. Sur les trois dernières années, le fonds a financé en moyenne une cinquantaine de projets par an, tous stades confondus : écriture, prototype et production finale. Des jeux comme Blue Bird’s Song, Blasterbug, Circe 2135 ou Tokotoko Islands ont bénéficié de ces subventions, qui varient de quelques milliers à plus de 150 000 € selon les ambitions et le stade de maturité des projets. Ces aides publiques jouent un rôle de tremplin crucial pour les studios indépendants, en sécurisant la première phase de développement et en facilitant l’accès à des financements complémentaires.

Ingénieur ENSAM Paristech et diplômé du MBA de l'ESSEC, Fabien est journaliste Tech & Pop Culture mais aussi Consultant IA et Marketing.