Longtemps avant les parodies de Michel Hazanavicius avec Jean Dujardin, le personnage d’OSS 117 avait déjà connu une carrière florissante au cinéma. Entre 1956 et 1971, huit longs-métrages d’espionnage inspirés des romans de Jean Bruce ont vu le jour. Ces films n’étaient pas des comédies, mais bien des aventures sérieuses dans la lignée de James Bond. Retour sur une saga oubliée… mais qui a marqué l’histoire du cinéma d’espionnage à la française.
OSS 117 est né dans les livres, bien avant James Bond
Créé en 1949 par l’écrivain Jean Bruce, Hubert Bonisseur de La Bath, alias OSS 117, est un agent secret américain d’origine française. Le personnage apparaît pour la première fois dans le roman « Tu parles d’une ingénue », avant de devenir le héros d’une série de plus de 250 livres.
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Coffret OSS 117
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Striptease pour OSS 117
Fait notable, le premier roman OSS 117 est publié quatre ans avant « Casino Royale », qui introduit James Bond sous la plume de Ian Fleming en 1953. Le succès est immédiat : Jean Bruce publiera plus de 90 romans avant sa mort en 1963. Sa femme Josette, puis sa fille Martine et son gendre François, reprendront la plume, assurant la pérennité de la saga littéraire jusqu’en 2013.
OSS 117 est une saga cinématographique à succès des années 60
Le cinéma ne tarde pas à s’intéresser au phénomène. Dès 1956, le premier film OSS 117 est produit : « OSS 117 n’est pas mort », réalisé par Jean Sacha.
Il est suivi d’un deuxième volet en 1960, mais c’est à partir de 1963 que la saga prend son envol sous l’impulsion du producteur Pierre Kalfon.
L’objectif est clair : concurrencer James Bond, alors en pleine ascension. Les budgets sont conséquents, les tournages internationaux, et la musique signée Michel Magne donne une vraie identité sonore à la série.
Huit films, plusieurs visages, un seul agent secret
De 1956 à 1971, sept films officiels sont réalisés autour du personnage :
- OSS 117 n’est pas mort (1956) avec Ivan Desny
- OSS 117 se déchaîne (1963) avec Kerwin Mathews
- Banco à Bangkok pour OSS 117 (1964) toujours Kerwin Mathews
- Furia à Bahia pour OSS 117 (1965) encore Kerwin Mathews
- Atout cœur à Tokyo pour OSS 117 (1966) avec Frederick Stafford
- Pas de roses pour OSS 117 (1968) toujours Frederick Stafford
- OSS 117 prend des vacances (1971) avec Luc Merenda
- et OSS 117 tue le taon(1971) un téléfilm avec Alan Scott
La série mise sur le dépaysement et les intrigues exotiques. Bangkok, Tokyo, Bahia… les tournages sont réalisés à l’international, ce qui confère une vraie ambition au projet. Certains films seront distribués dans plus de 40 pays.
Le box-office est au rendez-vous, surtout pour « OSS 117 se déchaîne » qui cumule plus de 2 millions d’entrées en France et attire également un large public en Italie et en Allemagne. Les affiches sont traduites, les génériques adaptés… OSS 117 parle plusieurs langues dans tous les sens du terme.
Les films originaux OSS-117 ne sont pas des parodies
Contrairement aux versions modernes réalisées par Hazanavicius, ces films ne sont pas tournés en dérision. Hubert Bonisseur de La Bath y est un espion méthodique, séducteur et implacable. Le ton est grave, les enjeux géopolitiques pris au sérieux, et les scènes d’action très inspirées du cinéma d’espionnage anglo-saxon. Les décors exotiques, les gadgets technologiques et les femmes fatales sont omniprésents, renforçant la comparaison avec l’univers de James Bond.
Malgré leur popularité à l’époque, ces films sont peu diffusés aujourd’hui. Plusieurs d’entre eux ont été remasterisés en DVD, mais restent difficiles à trouver en streaming. Pourtant, ils constituent un pan passionnant de l’histoire du cinéma français. Michel Hazanavicius lui-même a déclaré s’être inspiré de ces versions originales pour construire sa trilogie parodique avec Jean Dujardin, en reprenant plans, musiques et décors avec un effet volontairement rétro.
Le succès critique et public de « Le Caire, nid d’espions » en 2006 (2,3 millions d’entrées) relance alors l’intérêt du public pour ce personnage oublié.
Un retour possible du OSS 117 sérieux ?
Avec la mode des reboots et des hommages au cinéma vintage, certains producteurs envisagent aujourd’hui un retour aux sources plus fidèle du personnage. Plusieurs projets sont en développement, notamment une adaptation plus proche des romans d’origine, avec un OSS 117 sombre et réaliste, dans l’esprit des thrillers politiques actuels.
Si rien n’est encore confirmé, l’idée d’un Hubert Bonisseur de La Bath moderne, entre Jason Bourne et John Le Carré, pourrait séduire de nombreux scénaristes.
OSS 117, c’est donc l’histoire d’un espion qui a connu deux vies. La première, sérieuse et internationale, portée par le succès des livres de Jean Bruce et par une série de films ambitieux. La seconde, plus humoristique, initiée avec brio par Hazanavicius et Dujardin, qui a redonné une notoriété populaire au personnage.
Une chose est sûre : l’agent OSS 117 a encore de beaux jours devant lui.