OpenAI va lancer un navigateur web concurrent à Google Chrome

Ce nouveau navigateur, encore sans nom officiel, s’inscrit dans une stratégie offensive visant à garder l’utilisateur dans l’écosystème OpenAI, en supprimant autant que possible le besoin de consulter d’autres sites.

Google Chrome dans le viseur des régulateurs

Google Chrome est sous pression réglementaire : plusieurs enquêtes antitrust aux États-Unis et en Europe évoquent la possibilité d’un démantèlement partiel de l’écosystème Google, tant la domination du navigateur sur le marché semble incompatible avec une saine concurrence.

Les récents leaks internes publiés sur GitHub ont révélé que Chrome collecte en permanence une quantité massive de données comportementales, bien au-delà des besoins techniques.

L’impact sur le flux Discover, par exemple, est révélateur : les préférences de lecture, le temps passé sur les pages et les historiques de navigation servent à façonner un fil ultra-ciblé, sans transparence ni consentement éclairé.

Ce n’est donc pas un hasard si OpenAI, qui avait déjà proposé de racheter Chrome il y a quelques mois, décide finalement de lancer son propre navigateur web.

OpenAI lance un navigateur conçu autour de ChatGPT

OpenAI veut repenser entièrement l’expérience de navigation en y intégrant directement les capacités conversationnelles de ChatGPT. Là où Google propose une liste de liens, ce nouveau navigateur promet des réponses synthétiques, personnalisées et contextuelles. Il ne s’agit plus d’explorer le web manuellement, mais de déléguer cette tâche à une IA qui va trier, comparer, résumer et répondre de manière fluide à toutes vos questions.

Cette approche se rapproche de ce que proposent déjà Perplexity avec Comet ou The Browser Company avec Dia. Sauf qu’ici, c’est l’infrastructure ChatGPT qui sera au cœur de l’interface, soutenue par une base d’utilisateurs massive et un modèle linguistique déjà bien rodé.

Operator, l’agent personnel qui agit pour vous

L’un des éléments clés de ce navigateur est l’intégration d’Operator, un agent IA développé par OpenAI. Déjà expérimenté auprès de certains utilisateurs de ChatGPT Plus, Operator peut naviguer automatiquement sur des sites web, réserver un hôtel, commander un repas ou remplir des formulaires sans intervention humaine.

Imaginez : vous écrivez « réserve-moi un billet de train pour demain matin », et Operator s’occupe de tout. Cette automatisation s’annonce comme un tournant majeur pour les usages quotidiens du web.

Une offensive directe contre Google

Google domine largement le marché avec plus de 60% de parts pour Chrome et près de 90% pour son moteur de recherche. En proposant un navigateur centré sur des réponses générées par l’IA, OpenAI attaque frontalement ce modèle. Si les utilisateurs trouvent directement ce qu’ils cherchent via ChatGPT, ils n’ont plus besoin de passer par Google Search, et donc plus besoin de voir les liens sponsorisés qui constituent la principale source de revenus du géant californien.

Cette évolution menace l’ensemble du modèle économique basé sur la publicité ciblée, et annonce une redistribution des cartes pour les moteurs de recherche traditionnels.

Un web synthétique, mais centralisé

Ce choix de tout recentrer sur l’IA soulève aussi des interrogations. L’expérience utilisateur sera plus fluide, rapide et efficace, mais que deviendra la diversité des sources ? Si OpenAI filtre, reformule et synthétise les contenus, cela signifie que l’utilisateur ne voit plus les sites d’origine. En tant qu’éditeurs, journalistes ou créateurs de contenu, cela soulève des inquiétudes sur la visibilité, la rémunération et l’intégrité des informations diffusées.

À l’image d’Apple avec son App Store ou d’Amazon avec sa marketplace, OpenAI semble vouloir construire un environnement fermé où tout passe par ses outils, sans ouverture vers l’extérieur. Cela facilite l’expérience… mais peut aussi l’appauvrir.

La course à l’IA s’accélère

Le lancement de ce navigateur intervient dans un contexte de forte concurrence. Perplexity a déjà pris les devants avec Comet, et The Browser Company accélère sur Dia. Tous misent sur l’IA pour remplacer la navigation classique par une interaction directe. OpenAI, avec son avance technologique et sa base d’utilisateurs colossale, pourrait prendre une longueur d’avance si le navigateur s’avère aussi performant que prometteur.

L’enjeu ne se limite pas à l’ergonomie ou à la rapidité. Il s’agit aussi d’accès aux données. En gardant l’utilisateur dans son interface, OpenAI peut analyser en temps réel ses requêtes, préférences et comportements, afin d’améliorer ses modèles et de proposer de nouveaux services à forte valeur ajoutée.

Opera, lui aussi déjà sur la ligne de départ

OpenAI n’est pas seul à vouloir réinventer le navigateur du futur. Opera, l’un des plus anciens navigateurs encore actifs, a déjà intégré des fonctionnalités IA dans ses dernières versions.

Avec sa barre d’adresse intelligente « AI Prompt », son accès direct à ChatGPT et Gemini, et des outils de résumé de page ou de génération de texte, Opera veut aussi capter les utilisateurs à la recherche d’une navigation augmentée.

Ce repositionnement stratégique montre que même des acteurs historiques cherchent à ne pas rester à la traîne. La prochaine bataille ne se jouera donc pas seulement entre nouveaux venus, mais aussi avec ceux qui savent se réinventer.

Vers un nouveau paradigme numérique

Ce navigateur n’est pas simplement un outil de plus. Il cristallise une transformation plus profonde : celle d’un web piloté par l’intelligence artificielle, où la navigation devient une conversation, et où les sites eux-mêmes deviennent secondaires. Pour l’utilisateur, cela promet moins de frictions. Pour les acteurs traditionnels du web, c’est une menace.

Avec ce lancement imminent, OpenAI ne cache plus ses intentions : devenir un acteur central de l’accès à l’information, en court-circuitant les intermédiaires historiques. L’impact sur les usages, l’économie du web et la neutralité des contenus sera à surveiller de très près dans les mois à venir.