Cela faisait plus d’une décennie que Disney n’avait pas produit de long-métrage en animation traditionnelle. Depuis la sortie de Winnie l’ourson en 2011, le studio s’était tourné presque exclusivement vers la 3D, abandonnant peu à peu une technique qui a pourtant forgé son identité. Mais les lignes sont en train de bouger.
Selon le site spécialisé The Wrap, un petit groupe d’animateurs passionnés travaille actuellement sur de nouveaux projets 2D au sein de Walt Disney Animation Studios. Ce mouvement pourrait bien marquer une nouvelle ère pour l’un des piliers de l’animation mondiale.
La 2D n’est pas morte chez Disney
Pendant des années, la 2D semblait reléguée au rang de souvenir. Disney avait réduit son infrastructure technique, dispersé ses anciens talents, et laissé la place aux géants de la CGI. Pourtant, le savoir-faire n’a jamais disparu. Une poignée d’artistes a continué à œuvrer dans l’ombre, notamment pour des courts-métrages ou des projets destinés à Disney+. Avec la montée en puissance des plateformes de streaming et une demande croissante pour des contenus visuellement singuliers, Disney semble avoir trouvé le bon moment pour raviver la flamme.
Le court-métrage Once Upon a Studio, diffusé en 2023 pour les 100 ans de la firme, en était un indice fort. Ce projet hybride, mêlant personnages 2D et CGI, a été salué pour sa maîtrise technique et son hommage vibrant aux figures emblématiques du studio. Un an plus tard, le long-métrage Wish affichait lui aussi une esthétique influencée par l’animation traditionnelle, en brouillant les lignes entre dessin et infographie. Ces choix artistiques ne sont pas anodins. Ils montrent que la maison de Mickey n’a pas oublié d’où elle vient.
Le directeur de Walt Disney Animation Studios fait une annonce au Festival d’Annecy
Le signal le plus fort vient peut-être des propos de Jared Bush, le directeur créatif de Walt Disney Animation Studios, qui s’est récemment exprimé à ce sujet. Lors d’une intervention remarquée au festival d’Annecy, il a confié que les artistes 2D « font des choses follement impressionnantes en ce moment ». Une phrase qui a rapidement fait le tour des réseaux sociaux, ravivant l’espoir d’un retour en force de la main dessinée dans les productions maison.
Pour accompagner cette ambition, Disney s’est aussi doté de nouveaux moyens. En 2022, le studio a ouvert une antenne à Vancouver, spécifiquement dédiée à la production de séries animées pour Disney+. Cette structure permet de produire du contenu long-form tout en expérimentant de nouvelles techniques. Elle devrait jouer un rôle central dans les projets mêlant animation 2D et narration contemporaine, comme la future série Tiana, dérivée du film La Princesse et la Grenouille.
La 2D, un atout stratégique dans un marché saturé
Alors que la majorité des studios concurrents misent exclusivement sur la 3D, Disney pourrait tirer son épingle du jeu grâce à un style visuel différenciant. Le retour de la 2D permet non seulement de renouer avec une esthétique qui a fait ses preuves, mais aussi de séduire un public nostalgique tout en captant de nouvelles générations, sensibles à la richesse visuelle et au charme intemporel du dessin animé.
Dans un secteur où les productions tendent à se ressembler, proposer une approche artisanale devient un acte presque révolutionnaire.
Chris Buck, co-réalisateur de Wish et de La Reine des neiges, l’affirme sans détour : Disney envisage « absolument » de nouveaux films en 2D. Il souligne l’expressivité, la poésie et la liberté artistique qu’offre cette technique. Une opinion partagée par de nombreux artistes au sein du studio, certains ayant même plaidé pour que les prochaines grandes histoires prennent vie à travers le crayon plutôt que par le pixel.
Un retour aux sources inspiré par … les Studio Ghibli ?
Le succès continu des films du Studio Ghibli ou de productions comme Klaus sur Netflix montre qu’il existe un public fidèle pour l’animation traditionnelle. Ces œuvres rappellent que la 2D peut encore émouvoir, captiver et surprendre, à condition de la traiter avec soin et ambition. En ce sens, Disney ne fait pas que raviver une flamme : il tente de redéfinir ce que peut être un grand film d’animation à l’heure du streaming.
Revenir à la 2D ne sera pas sans difficulté. Il faudra recruter, former, et parfois réinventer des processus entiers. Mais pour un studio aussi emblématique, ce défi a autant de valeur artistique que symbolique. Réinvestir dans le dessin à la main, c’est aussi réaffirmer que l’émotion, le mouvement et la narration passent parfois mieux par le trait que par le polygone. Et dans un monde saturé de CGI, cela pourrait bien être l’atout maître de Disney pour se réinventer.
